De zéro à un : Comment anticiper la future valeur

De zéro à un : Comment anticiper le futur

“La plupart des gens pensent que la mondialisation définira l’avenir du monde, mais la vérité c’est que la technologie pèse encore davantage”. – Peter Thiel.

Où se situe la valeur économique ? Un entrepreneur doit-il craindre la concurrence ? Pourquoi faut-il rechercher les lois de puissance ?

Voici les trois questions fondamentales auxquelles répond Peter Thiel dans le livre “De Zéro à un. Au fond, il répond à une seule question : Comment anticiper le futur ? Autrement dit, comment trouver la future valeur ?

Peter Thiel est un entrepreneur et investisseur mondialement reconnu. En tant qu’entrepreneur, il a créé PayPal. En tant qu’investisseur, il a investi dans le financement de start-up qui sont devenues des monopoles mondiaux (notamment Facebook, SpaceX et LinkedIn). C’est également un libre penseur qui n’hésite pas à prendre des positions contrariennes [1] .

Dans cet article, vous découvrirez quels sont les trois éléments principaux que doit rechercher celui qui investit son argent ou son temps et qui vise le rendement maximum.

La valeur est dans la création

Selon Peter Thiel, il y a deux types de progrès :

  • Le progrès vertical : passage de 0 à 1. Il s’agit de créer du neuf. C’est la technologie.

  • Le progrès horizontal : passage de 1 à n. Il s’agit de copier ce qui fonctionne. C’est la mondialisation.

La plupart des gens pensent le progrès par la mondialisation. Ils imaginent que les nations riches ont déjà tout réalisé et que les nations moins développées vont progressivement les rattraper. Mais selon l’investisseur à succès, ce n’est pas la mondialisation qui définit l’avenir du monde, c’est la technologie.

Et où naissent les nouvelles technologies ? Essentiellement dans les start-up. Ces petites sociétés sont avantagées par leur taille et par leur fraicheur : partant de zéro, elles peuvent innover radicalement. Les grandes entreprises ont plus de moyens mais elles sont bien plus lentes car trop administratives. Leurs innovations sont généralement des innovations de soutien (des copies améliorées) et non pas des innovations de rupture (des créations).

A quoi reconnaît-on une future start-up créatrice de valeur ? Pour l’auteur de “De zéro à un”, elle doit suivre les principes suivants:

  • Etre capable de penser par soi-même : le fondateur ne doit pas suivre des schémas prédéfinis. Il doit penser les choses à partir de zéro. Airbnb a repensé totalement la location de logements de particuliers. Uber a redéfini le transport. Tesla a repensé la voiture électrique. Toutes ces start-up technologiques ont créé énormément de valeur pour les utilisateurs, les entrepreneurs/salariés et les investisseurs;

  • Risquer l’audace plutôt que la banalité;

  • Avoir un mauvais plan plutôt que pas de plan du tout. La société pourra toujours pivoter en cours de route;

  • Rechercher un monopole. Elle doit éviter les marchés concurrentiels car ils sont destructeurs de profit;

  • Avoir une stratégie efficace de distribution. Les ventes comptent tout autant que le produit;

  • Capter une partie de la valeur créée.

La valeur est dans le monopole

Le monopole n’est pas une pathologie ou une exception. Le monopole est la situation de toute entreprise qui réussit.” – Peter Thiel.

Thiel définit un monopole comme “une entreprise si performante qu’aucune autre ne peut proposer de substitut digne de ce nom. Une entreprise qui fait face à trop de concurrence voit tous ses profits disparaître. Pour Peter Thiel, le capitalisme et la concurrence sont donc à l’opposé l’un de l’autre : le capitalisme repose sur l’accumulation et seul un monopole peut accumuler des profits.

L’auteur de “De Zéro à un” précise qu’il peut être difficile, au départ, pour un observateur de distinguer un monopole versus une société qui fait/fera face à beaucoup de concurrence. D’autant plus que l’essentiel de la valeur d’une société technologique proviendra 10 à 15 ans après sa création. En effet, dans un premier temps, elle doit se concentrer pour faire augmenter son nombre d’utilisateurs afin de faire jouer les effets de réseau.

De plus, le monopole mentira pour se protéger : il dira (cf. Google) qu’il fait face à beaucoup de compétition pour éviter d’attirer l’attention (du régulateur et de la presse).

Quant à celui qui fait face à une rude concurrence, il fera le mensonge opposé : il dira qu’il est dans une petite catégorie spéciale qu’il domine pour minimiser l’impact de la concurrence visible. On peut penser au restaurateur italien qui fait en réalité face à tous les restaurateurs de son quartier et non pas uniquement à ceux de sa spécialité.

Les monopoles ont généralement mauvaise réputation. Mais Thiel explique que c’est parce qu’on imagine des collecteurs de rente qui font grimper leurs prix comme ils le souhaitent dans un marché captif. Selon lui, dans notre monde dynamique, le monopoliste est obligé d’être créatif : il doit inventer et améliorer. C’est donc bénéfique à la société.

Leurs profits importants leur permettent de financer sereinement des projets de recherche à long terme que les autres entreprises (focalisées sur les résultats à court terme) ne peuvent se permettre. Les monopoles sont donc pour Thiel les principaux contributeurs du progrès.

A quoi ressemble une société qui disposera de fortes liquidités futures ?

Les caractéristiques d’un monopole
  • Une technologie exclusive. Elle doit rendre le produit difficile ou impossible à répliquer. Elle doit être dix fois plus efficace que celle de son proche substitut. Plutôt qu’une amélioration, il faut rechercher la disruption. Mais le futur monopole doit également veiller à ne pas attirer l’attention trop tôt. Il doit éviter de s’afficher publiquement comme une rupture. Par exemple, PayPal n’a jamais cherché à défier Visa. La société a préféré se proposer comme potentiel partenaire pour élargir le marché des paiements. Stripe procède de même avec les banques.

  • Des effets de réseau. Ces effets font augmenter la valeur du produit à mesure que davantage de gens s’en servent. “Viens pour le produit, reste pour le réseau”. Les activités d’effets de réseau doivent démarrer sur des petits marchés de niche (Facebook a démarré à Harvard). Elles doivent rechercher un petit groupe de gens qui ont un besoin et qui ne sont pas satisfaits par l’état du marché.

  • Des économies d’échelle (une capacité à scaler). Une activité monopolistique se renforce en grandissant. Les start-up de logiciels bénéficient d’économies d’échelle car elles peuvent scaler à moindre cout : le coût de production d’un nouvel exemplaire est proche de zéro. Par exemple, Amazon a commencé par les livres avant de dominer tout le commerce en ligne (mais son ambition était écrite dans son nom).

  • Une image de marque. Le monopole en devenir doit créer une marque forte.

La valeur est dans la loi de puissance

Le smart money indique où sont situées les meilleures opportunités financières. “De zéro à un” indique qu’actuellement les plus gros rendements sont situés dans le capital-risque. Les investisseurs tentent de tirer profit de la croissance exponentielle des entreprises à leur stade initial.

A titre d’exemple, Y Combinator, la société américaine de financement de Start-up, a investi 20K en échange de 6% de Airbnb en 2009. Aujourd’hui, onze ans après, ces 20K valent 30 milliards de dollars (!).

Comment procède un investisseur en capital-risque ? Il monte un fond qui lui permet d’investir dans plusieurs sociétés technologiques prometteuses. Ce fond a généralement une durée de vie de 10 ans. Il fait un profit substantiel lorsque l’une des entreprises de son portefeuille est rachetée ou cotée en bourse.

Bien sûr, c’est un investissement très risqué car la plupart des start-up échouent (idem pour la majorité des fonds). Mais il suffit qu’il y en ait une qui se révèle nettement plus performante que les autres pour que le fond soit rentable. Le capital-risqueur doit donc investir dans des start-up qui ont un potentiel de croissance suffisant (des monopoles potentiels) pour pouvoir rapporter au moins la valeur de tout le fond (il doit faire des paris EV+).

Le plus gros secret dans l’investissement est que le meilleur des investissements d’un fond doit être égal ou doit surperformer le reste du fond combiné.”- Peter Thiel.

Cela implique que l’investisseur ne doit pas trop se diversifier : il doit miser suffisamment pour qu’un seul gain puisse compenser toutes les autres pertes. La loi de puissance s’applique à toute forme d’investissement (énergie, temps et argent). Les paris qui ciblent les rendements exponentiels doivent être informés, sélectifs, conséquents et à long terme.

Il est facile d’ignorer les événements loi de puissance car il est douloureux d’accepter que la plupart de ce qui se passe n’est pas si important. Au cours des 20 dernières années, le 11 septembre, l’effondrement de Lehman Brothers et le Covid-19 ont été à peu près les seuls évènements importants. Pensez à toute l’attention qui est allée à tout le reste et qui n’a finalement pas fait beaucoup de différence; c’est déprimant. Idem pour l’investissement: faites 50 investissements et 10 ou moins – peut-être un ou deux seulement – vous fourniront probablement tous vos rendements.

Morgan Housel
Le mot de la fin

“Vis dans le futur, ensuite construis dans le présent ce qui manque.” – Paul Graham.

Création, monopole et loi de puissance. Voici les trois éléments principaux que doit rechercher celui qui investit son argent ou son temps et qui vise le rendement maximum. Pour faire partie des premiers à anticiper le futur, c’est-à-dire à trouver ces trois éléments, il devra apprendre à penser par lui-même, soit à être contrarien mais juste.

Peter Thiel posait systématiquement aux candidats qui postulaient chez lui la question suivante : “quelle est la vérité fondamentale que très peu de gens partagent avec vous ?”. La bonne réponse est celle qui essaie d’anticiper ce qui est considéré à tort comme faux aujourd’hui par la majorité mais qui fera consensus demain. Autrement dit, il s’agit de trouver les secrets d’aujourd’hui qui deviendront les vérités de demain.

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“Ne dites pas aux autres vos plans. Montrez-leur vos résultats.

Pour aller plus loin : Lire le livre “De Zéro à un de Peter Thiel.

[1] Etre contrarien signifie investir contre la foule et être sceptique contre le consensus social actuel (soit contre le sentiment dominant du marché).

Copier et partager : https://mikaelecanvil.com/de-zero-a-un/

 

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